Quand je suis en manque de toi

Et puis, il y a eu le manque. Presque inattendu en somme. Je ne l’ai plus ressenti ainsi depuis un moment maintenant. Sûrement depuis Christophe, le dernier que j’ai aimé si profondément et dont j’ai eu tant de mal à me remettre, malgré la courte durée de l’histoire. Ce n’est évidemment pas le temps qui fait la difficulté, mais l’intensité. Or là, compte tenu de mon planning très chargé et de la période des fêtes de fin d’année, nous allons devoir passer la plus longue période d’absence depuis le début. Dix jours, cela ne paraît pas insurmontable, mais me plonge dans un état de mauvaise humeur et de tristesse mêlées que je n’aime pas ressentir. J’essaie de formater mon cerveau en mode “fais comme si tu étais célibataire”, mais ça ne marche pas. Je me dis que je suis en sevrage, comme pour un jeûne, que ça va forcément passer au bout de trois jours. Mais chaque matin, mon état empire. Pourtant, j’ai exactement la relation que je désire. Les contacts quand nous ne sommes pas ensemble se réduisent à des choses plus ou moins pratiques, jamais pour vérifier que l’autre est encore là. Je sais juste que lui aussi a un peu de mal, mais il semble bien le gérer. Alors, je ne lui fais pas part de mon état sauf à confirmer que je ressens la même chose que lui. C’est évasif et non envahissant.

Le troisième matin, je me réveille en mode réflexion. Je reprends mes notes sur le manque, constate en effet que cela fait longtemps que je n’ai pas écrit être en état de manque. Au contraire, depuis deux ans, j’indique à mon journal que justement, il ne me manque pas. Et j’en suis fière comme une marque de guérison de ma dépendance affective. D’autres pensent et me disent que c’est au contraire par absence d’amour suffisant. Mais, je refuse de tomber à nouveau dans l’addiction, celle qui me fait peur. “Bien seule, mieux à deux”. Mais hors de question de ne pas être bien quand il n’est pas suffisamment là. Et pourtant, c’est bien ce qui est en train de m’arriver. Et puis, je tombe sur une citation qui m’interpelle : “Le bonheur, ce n’est pas avoir ce que l’on veut, mais vouloir ce que l’on a”. Or là, j’ai ce que je veux (comme forme de relation) et je ne suis pas heureuse. Parce que l’autre devient une drogue. Je me dis donc que c’est une épreuve supplémentaire pour évoluer, et qu’il ne faut pas que je craque. La journée passe, mais pas l’envie. Je finis donc par l’appeler, ce que je ne fais jamais. Il croit d’ailleurs qu’il y a quelque chose de grave. Non, j’ai juste envie qu’on se parle. Ce n’est pas parce qu’on ne se voit pas, qu’on ne peut pas s’échanger un peu. D’autant que nous nous nourrissons aussi de nos échanges intellectuels, pas que de nos caresses.

Je lui fais donc part de mes réflexions. Lui aussi est en manque et en colère, mais il est résigné et sage, il attend en se disant que c’est ainsi. Moi, au contraire, je me dis qu’on aurait pu faire autrement, qu’on aurait pu réussir à se voir malgré nos plannings, et chaque jour devient plus douloureux de constater que l’on ne fait rien pour cela. Moi entêtée, lui résigné. Comme deux cons quoi. Je dois raccrocher car mon modèle est arrivé, à l’heure. Il sait que j’ai une séance, et bien sûr comment ça se passe. Il est 19h30. Deux heures plus tard, alors que nous n’avons pas encore fait le tour des poses avec ce modèle géant dont j’avais oublié la taille si impressionnante, il m’appelle. Je suis en séance donc je ne réponds pas, mais je regarde mon écran et constate qu’il m’a écrit un message. Je prends quand même le temps de lire : il faut savoir où sont nos priorités dans la vie ! Il me propose de le rejoindre après ma séance, il m’attendra. Il craque et c’est soulageant pour nous deux. Il me rejoindra une heure plus tard, pour un corps à âmes qui nous met le sourire immédiatement. C’est la première fois qu’il prend ce genre d’initiatives, et j’en suis si agréablement surprise. Je le taquine un peu, soulevant qu’il peut aussi avoir son grain de folie derrière ses airs sérieux. Cet interlude m’a apaisé. C’était probablement une erreur de résister à nos envies communes.

Il faut dire que j’ai à m’habituer à la lenteur, je l’écoute, lui qui souhaite prendre son temps. Je suis allée explorer son terrain, d’une certaine manière. Il dit que cela n’en sera que meilleur si on attend, plutôt que d’assouvir tout de suite nos envies. Comme lorsqu’on a envie de s’acheter quelque chose, ça peut être encore meilleur d’attendre avant de l’obtenir. Je peux comprendre cela, et en même temps, s’agissant d’envies instantanées, je crains ne plus les avoir plus tard. Je crains qu’elles ne s’estompent, et possible que lui estime que cela n’en vaut pas la peine, si justement elles s’estompent. Il n’est pas dans l’immédiateté, mais dans le long terme. Il construit une relation durable et solide. Il la veut longue et profitable. C’est ce que je comprends inconsciemment, quand mon désir me laisse du répit. Mais finalement, lui aussi a fait un pas vers moi. Il a réussi à répondre à nos envies immédiates et ne pas attendre que les jours passent. J’ai tant aimé ce geste. L’un vers l’autre, nous avançons à pas de velours. J’ai la sensation de quelque chose de nouveau que je ne perçois pas vraiment. D’où l’envie d’écrire cette histoire à mesure de son évolution. Sans en connaître la fin. En tous les cas, ce qui est sûre, c’est que je me sens mieux depuis, alors qu’il reste encore cinq jours avant de se retrouver.

Cette fois (quelques semaines plus tard), nous nous sommes préparés à une nouvelle période de séparation, qui va durer une semaine heure pour heure. Nous en sommes exactement deux mois plus tard et six semaines de vie commune (par envie, sans se poser d’autres questions). Pour des raisons de logistique familiale, nos séparations n’ont jamais été plus longues que deux jours/deux nuits sur cette période, toujours aussi difficiles pour nous deux, exprimés de la même manière. Mais nous en avons parlé, à chaque fois, comme pour nous rassurer dans cette forme de dépendance qui nous fait flipper autant l’un que l’autre (il me semble). Alors, nous avons pris soin de nous avant le départ, comme pour faire le plein de tout ce qui nous nourrit l’un de l’autre. Une journée “grotte” à ne penser qu’à nous, à explorer notre intimité qui évolue chaque jour, à nous dire “je t’aime” sous toutes ces formes. Le langage du corps semble être de plus en plus fluide, à mesure que le langage tout court l’est. La communication ! Il n’y a rien de plus important. Nous sommes des êtres dotés de la parole, ce n’est pas un hasard.

Sur le chemin de la gare où il nous accompagne, ma fille aînée nous renvoie notre miroir : tensions avec son amoureux de deux mois, parce qu’il ne parle pas, qu’il a peur des sentiments qu’elle pourrait avoir et qu’elle n’ose plus lui en parler de peur de se faire refroidir, comme il l’a fait la première fois qu’elle a osé lui parler de son attachement à lui… (”il ne faudrait pas que tu t’attaches trop vite…”). Tiens, tiens… Nous sourions en l’écoutant se confier avec cette aisance naturelle qu’elle assume depuis le début de notre histoire. Quand elle l’a rencontré, nous étions tranquillement en train de dîner (notre quatrième rencontre, juste après la bise sur la joue et juste avant le film main dans la main), et elle s’est sentie libre de me parler de sa vie intime comme s’il n’était pas là, ou plutôt sans être gênée de sa présence. Elle apprécie son absence d’intrusion, sa discrétion, le fait qu’il sache rester à sa place en toutes circonstances. Cette forme d’intelligence humaine que j’affectionne particulièrement et que j’ai si rarement rencontrée dans ma vie à aujourd’hui. Un Trésor, je vous dis.

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3 commentaires sur « Quand je suis en manque de toi »

  1. Un bon moment déjà que je me pose la question de ce qu’est l’amour. Est-ce un besoin d’aimer l’autre ? Celui de se sentir aimé? Les deux à la fois ? Je n’ai pas la réponse. Mais je sais que l’on nomme amour fait souffrir. Je suis vraiment tenté de me contenter d’une tendresse bienveillante.

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