Quai de la gare, il fait bon en ce début avril. Trois semaines que nous attendons cette rencontre avec patience et envie. Je viens retrouver un couple, pour vivre un trouple. C’est notre première fois, à tous les trois, mais déjà nous ne sommes que deux. Elle ne l’a pas accompagné pour le trajet, finissant de se préparer. Son absence a laissé la place à notre premier baiser, juste posé pour se dire bonjour.
Elle lui souffle de me baiser.
Comme dans mon rêve éveillé, on se connaît déjà et pourtant non. Silence, regards, trouble peut-être. J’ai médité dans le train, je suis fatiguée, excitée mais calme. Beaucoup d’émotions liées à la situation nouvelle pour moi, à l’enjeu peut-être aussi. Le temps et l’espace sont propices à tous les délices, ce à quoi nous allons nous livrer pendant les prochaines 30 heures. Tout va très vite, le charme s’opère, nous nous plaisons, bien que j’ai un doute sur ce qu’elle pense. Elle n’est pas si chaleureuse que je l’espérais. Elle lui souffle de me baiser, parce qu’elle suppose que je n’attends que ça.
Je suis surprise, car oui je les ai désirés pendant ces semaines d’attente, mais là j’ai surtout envie de prendre mon temps. J’ai envie de déguster la découverte, la montée des marches est presque finie et c’est là que c’est le meilleur. A vouloir accélérer le mouvement, le goût du mystère se perd trop vite. Mais ils sont deux, et je m’adapte. Une heure à peine après mon arrivée, et nous sommes déjà passés du côté de l’intime. La situation est des plus enivrantes par la nouveauté, le cadre et la beauté des corps. Mais il me manque quelque chose que je cerne tout de suite : la sensualité et la lenteur. Je ne sais combien de fois et pendant combien de temps nous avons échangé nos corps. Je n’ai pas réussi à compter. Une machine à sexe.
Le couple de mes parents était fusionnel
Je me réveille au son de leurs ébats. J’ai très mal dormi, sur un canapé peu confortable. Un nouvel environnement, de nouvelles énergies, des bruits et des odeurs inconnus, un univers à part entière. C’est déjà bien suffisant pour perturber mon sommeil. Je me sens fatiguée, et par conséquent plus sensible encore qu’à l’ordinaire. Je me questionne sur mon envie de les rejoindre, supposant que je serai la bienvenue. La situation m’excite mais le souvenir d’un contexte de mon enfance, dans la caravane avec mes parents, expédie ma libido au fin fond de mon mental. S’immiscer dans la vie intime d’un couple vient raviver la relation parentale d’une force que je n’avais pas anticipée. Je décide de m’extraire du bus pour méditer face au soleil levant.
Je l’ai identifié précédemment déjà, c’est nouveau pour moi, une prise de conscience. Le couple que je cherche ouvre la blessure du rejet. Dit comme ça, c’est évident après coup. Ça ne l’a pas été forcément tout de suite. Alors, j’accepte. C’est donc ça que je viens guérir. D’autres signes me le confirmeront ensuite. Elle porte le même prénom que ma mère, en français elle. Il n’y a pas de hasard. Toujours pas. Le couple de mes parents était fusionnel, de ce fusionnel destructeur dont ils auraient pu se passer. Dont ils auraient pu m’épargner. Je me demande si je vais aussi avoir ce rôle de réconciliant que j’ai longtemps joué, malgré moi. Leur couple étant mort, c’est comme si j’en trouvais un autre en remplacement. Pour guérir de mes traumas ou pour retourner dans une relation destructrice ?
Je t’aime, femme !
Il m’a glissé un « je t’aime, femme », en m’embrassant sur la joue. Ça a résonné comme un élan du cœur, comme je sais aussi le sentir, et parfois le dire. Si évident et en même temps si précipité. Elle nous a laissé un long moment seuls, juste avant le départ. J’en avais envie, pour savoir ce que je ressentais vraiment sans interférence. On a parlé de polyamour, de polyfamille, de son envie d’enfanter avec elle. J’ai dit que j’avais tout mon temps. Lui, non. Il semblait pressé de vivre les choses car il attend cela depuis longtemps. J’ai eu fortement envie de m’investir dans cette histoire qui me semblait idéale.
J’ai proposé de revenir dans quinze jours. Elle a trouvé ça rapide : une réaction intuitive me confirmant que ce n’était pas si facile pour elle. Quelque chose qui ne sonnait pas juste dans mes vibrations. Une semaine plus tard, elle le quittait, ne trouvant plus sa place. C’était il y a un an jour pour jour, le 08 avril 2017.
Les liens cités dans cet article, et ceux que tu pourrais aimer :
Je pars parce que je me manque
Du polyamour au libertinage ou la fin de la pudeur
Si tu aimes cet article, dis-le moi 👇🏽 j’ai envie de savoir 😃
Ces blessures qui se réveillent !!
Il y aussi ces blessures qui semblent reprendre une place qui leur appartient, lorsqu’elle résonne avec leur contraire…
La douceur, la bienveillance, le geste protecteur !!!
La porte qui s’ouvre alors, est légèreté, reconnaissance tant ce moment sera unique, et la clef utile pour chaque autre pas qui peut alors se dessiner en volupté !!!
Et surtout en pleine conscience sans qu’aucune blessure ne vienne pleurer dans le silence de la chair…
Cela s’appelle l’épanouissement !!!
Merci à toi, d’avoir été cette personne qui m’a rendu la sérénité…
Dans cette force qui t’habite de regarder ta propre vie, tes propres blessures !! Nous ne pouvons qu’en faire autant et avancer
Je suis touchée par cet « avoeu » Belle Dame. Je n’ai pas conscience de ce que je génère tant que le miroir n’a pas parlé… et là tu mets des mots sur ton vécu. Pourras tu bientôt l’écrire en profondeur ? J’ai envie de te lire encore.
C’est plein d’intelligence, ce que tu écris, de vérité et de simplicité mise à nu.
Merci de l’accueillir ainsi.
Aïe….
cette publication est importante dans ce qu’elle révèle de profondeur et de dimension psychanalytique (?) des relations humaines. voys avez du percevoir des signes sur les difficultés de ce couple. la question qui me vient: avez vous resdenti de nouvelles fois le lien à vos parents, cette blessure quz vous évoquez si bien. ce texte est lumineux
Je n’en ai pas eu le temps.